Karl le meneur de jeunes
Karl Leisner est né le 28 février 1915 à Rees, petite ville de Basse Rhénanie, sur la rive gauche du Rhin, non loin de la frontière des Pays Bas. Il est le premier enfant d'un foyer qui en comptera cinq. Son père, Wilhelm, 29 ans, est un homme très ordonné, aux fortes convictions, très attaché à la foi catholique reçue des ancêtres. Sa mère Amalie, 23 ans, est un être plein de douceur, aimable et bienveillante, qui trouve dans son rôle de mère et d'épouse l'accomplissement de son existence.
Il passe une enfance heureuse à Clèves, non loin de Rees, où son père est muté en 1921, avec son frère et ses trois soeurs. Karl s'épanouit au contact de la nature environnante, et s'enivre de jeux dans l'immense forêt qui entoure la ville.
Lorsqu'il entre au lycée, Karl rencontre l'abbé Vinnenberg, qui est tout à la fois l'aumônier, le professeur de religion et le professeur d'éducation physique. C'est à son contact que Karl se révèle rapidement rapidement dans sa nature de boute-en-train, de meneur de jeunes, d'organisateur.
Mais l'aumônier lui propose également de créer un groupe de jeunes, et demande à Karl d'accepter la charge de secrétaire. Karl doit tenir le cahier des séances et rédiger le compte rendu des réunions . C'est à cette fonction que l'on doit aujourd'hui le journal intime de Karl, qui a continué toute sa vie a relater son histoire et le combat de son âme.
Le journal de Karl décrit ainsi les nombreuses et pittoresques randonnées du groupe, au fil des années. Les sorties succèdent aux sorties, où la messe est toujours le sommet des journées. Très souvent, seul ou avec son groupe, Karl se rend en train, à pied ou à vélo à Kevelaer, haut lieu marial allemand, où sa dévotion à Marie héritée de sa maman s'exprime pleinement.
Ses années d'adolescence voient progressivement mûrir sa résolution, sa détermination: son énergie, sa discipline intérieure et sa fougue sont toutefois tempérées par sa volonté d'accorder en tout la primauté au spirituel. Cette sorte d'imitation de Jésus-Christ, vécue par un adolescent à le recherche de la perfection et de l'absolu, sera un puissant contre-feu aux assauts de plus en plus tonitruants du nazisme qui cherche à faire des jeunes ses premiers alliés...
Karl et la Mère Trois fois Admirable de Schoenstatt
Au printemps 1933, alors qu'il prépare le bac, Karl effectue une retraite spirituelle qui marque un tournant dans sa vie: il rencontre le mouvement apostolique de Schoenstatt. A l’heure où se lève en Allemagne une idéologie qui base sa philosophie sur la négation de la liberté personnelle au profit de l’éducation des masses, Karl découvre à Schoenstatt une école spirituelle qui l’ouvre sur la formation de l’homme intérieur. Cette retraite sera le déclencheur de tout ce qui orientera ultérieurement la vie spirituelle de Karl. Le ferment semé ces jours-là lui permettra plus tard de s’opposer lucidement aux courants du national socialisme, de cultiver en permanence sa vie spirituelle intérieure. L’empreinte qu’avait laissé sur lui jusqu’alors la liturgie et les mouvements de jeunesse est renforcée ; il reçoit une nouvelle impulsion dans sa maturation intérieure qui le pousse désormais à travailler encore plus fortement sur soi, et à s’auto-éduquer.
Mais plus que tout, Karl est marqué par un aspect particulier de la spiritualité de Schoenstatt : la dévotion à la Vierge Marie, connue à Schoenstatt sous le vocable de la MTA , la Mater Ter Admirabilis, ou Mère Trois fois Admirable. Au coeur de cette spiritualité, il y a l'alliance d'amour avec Marie. C'est un lien personnel avec la Mère de Dieu, dans lequel on s'abandonne totalement à la Sainte Vierge, non pas seulement spirituellement, mais très concrètement. Karl reçoit dans cette alliance le charisme de l'abandon; il en portera la marque jusqu'à la fin de sa vie., et plus particulièrement à Dachau. Toute sa vie, cette dévotion à la MTA sera sans faille; Karl prendra souvent ses forces à la source de Schoenstatt, celle-ci allant d'ailleurs providentiellement le joindre providentiellement jusqu'à l'intérieur même du camp de Dachau.